(1836 - 23/02/1903)
Fils d’un riche meunier, Jean-Baptiste Clément renonce très jeune à la fortune de ses parents.
A 14 ans, il était garnisseur de cuivre, “le plus insignifiant de tous les métiers”, disait-il, avec ce métier, il était indépendant.
Tour à tour, il devient commerçant en vins ou encore terrassier au tunnel de Nogent.
A l’âge de trente ans, il s’établit Butte Montmartre à Paris où il fréquente les salles de rédaction de journaux socialistes.
A cette époque, la presse était surveillée de près et la censure frappait souvent très fort.
C’est ainsi qu’il est condamné pour avoir publié un journal sans cautionnement et pour offenses envers l’Empereur.
Il est reclus dans la prison de Sainte Pélagie jusqu’à ce 4 septembre 1870, jour de l’insurrection républicaine, après la déchéance de Napoléon III vaincu à Sedan.
Clément le pamphlétaire s’est aussi exprimé par la chanson engagée avec “89” ou tendre, telle la délicieuse romance du “Temps des Cerises”, reprise bien plus tard par Yves Montand et Juliette Gréco.
La Commune fut sans conteste une des grandes expériences de sa vie, après l’insurrection parisienne du 18 mars 1871.
Elu dans le XVIII ème arrondissement avec Blanqui, Vermorel et Ferré, il exerce de lourdes responsabilités, sachant allier le sens de l’organisation à l’ardeur révolutionnaire.
Le 28 mai 1871, il participe au dernier combat, à la dernière barricade de la rue de la Fontaine-au-Roi, au lendemain de la fusillade du Mur des Fédérés.
Ce combat engagé lui impose plus de 8 années d’exil où il n’abandonne pas ses activités politiques puisqu’il correspond avec tous les chefs socialistes de France.
Condamné à mort par contumace en 1874, il est amnistié en 1879, puis rentre à Paris en 1880.
Délégué à la propagande par la Fédération des Travailleurs Socialistes, il parcourt la province où il découvre la rigueur des conditions faites aux ouvriers, qui avaient empiré depuis 1871 : le chômage, les bas salaires, les règlements draconiens, des gosses mourant de faim.
C’est ainsi qu’en 1885, il vient pour la première fois dans les Ardennes soutenir une grève à Château- Regnault, où il fonde la Fédération Socialiste des Ardennes.
Il revient en 1888 et découvre une situation syndicale peu brillante.
Pendant 6 années, il engage un lent travail d’organisation et d’éducation des masses laborieuses.
C’est sans doute dans les Ardennes que Jean-Baptiste Clément déploya le mieux ses qualités de propagandiste et d’organisateur. Il crée des dizaines de syndicats, des cercles d’études politiques ; il organise des centaines de réunions ; il rédige presque seul “l’Emancipation” devenu “l’Emancipateur” en 1891 ; il mène le combat aux élections législatives de 1888 et 1893 où la fédération des Ardennes le présente.
C’est dans ce contexte que s’inscrit la syndicalisation du textile sedanais, dont Jean-Baptiste Clément fut le maître d’oeuvre. Il réussit à conquérir les tisseurs des villages des alentours de Sedan, restés longtemps réfractaires à l’organisation syndicale, sous l’impulsion des ouvriers de Saint-Menges.
Une grève est déclenchée le 29 mars 1891 par les tisseurs des manufactures sedanaises et des localités voisines : ce sont 3500 ouvriers qui réclament une augmentation de salaire.
A l’entente patronale, les tisseurs opposent un comité de grève aidé par les municipalités textiles de Sedan, Saint-Menges, Bazeilles, Francheval, Pouru-aux-Bois, et bien d’autres, où Jean-Baptiste Clément organise de nombreuses réunions publiques et contradictoires. Cette bataille dura un mois et demi et se solda par une victoire ouvrière : le travail reprit au tarif proposé par les grévistes.
Le 1er mai 1891, le chômage est général dans les centres industriels à forte concentration ouvrière. Au son de la Carmagnole et de la Marseillaise, on réclame la journée de 8 heures. Ce jour-là, à Fourmies, la troupe tire sur la foule. On dénombre 9 morts dont des enfants : Fourmies donne à la IIIème République sa première tragédie ouvrière. Le même jour, à Charleville, Jean Baptiste-Clément est arrêté et emprisonné. Le lendemain, dans un Charleville en état de siège, le verdict est sévère : 2 ans de prison et 5 ans d’interdiction de séjour. Le soir même, il est secrètement emmené à la prison de Nancy. Une vague de protestations déferle contre l’arrestation et l’emprisonnement de Jean-Baptiste Clément. Finalement, après 7 semaines de prévention, la Cour d’Appel de Nancy le condamne à 2 mois de prison et l’interdiction de séjour est levée. Son action dans les Ardennes n’était pas sans susciter une certaine crainte et beaucoup d’opposition de la part de ses adversaires : le patronat ardennais, l’Eglise, les journaux “bourgeois”, la police et même parfois l’ouvrier qui se montre rebelle à l’organisation durable comme à l’éducation politique. Devant le relâchement des groupes, à partir de 1892, Jean-Baptiste Clément demande son remplacement. On le supplie de rester. Il cède mais, usé par la maladie, il n’a plus la même fougue.
En décembre 1894, Jean-Baptiste Clément « le Vieux » quitte les Ardennes, le coeur serré.
Il fut ensuite employé à la mairie de Saint-Denis, puis il collabora au journal « La Petite République ».
Il s’éteint le 23 février 1903 à l’âge de 66 ans.
Le 26 février, 4 à 5000 personnes l’accompagnent au cimetière du Père Lachaise.
Jean-Baptiste Clément consacra donc toute sa vie à l’émancipation du peuple.
Ses convictions socialistes venaient davantage de l’expérience vécue et de son contact permanent avec le monde ouvrier.
Son action courageuse, qui lui fit laisser chaque jour un peu de sa santé et sa méthode permirent d’éduquer, d’organiser, de défendre les travailleurs et donnèrent naissance à une nouvelle génération de syndicalistes.
Laissons un de ses plus fidèles amis lui rendre hommage : “le souvenir d’un tel homme ne s’effacera jamais, la distance et le temps le rendent plus cher encore à ceux qui purent apprécier toutes les qualités foncièrement bonnes de son coeur de beau poète et de prolétaire révolté contre toutes les injustices sociales…
Et pourtant, jamais propagandiste ne fut autant vilipendé que Jean-Baptiste Clément. Mais rien ne l’arrêtait : ni les condamnations, ni les méchancetés capitalistes, ni l’indifférence ouvrière. Ce fut vraiment une grande figure de l’époque héroïque du socialisme”.
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